Identification d’un châssis saharien

Dans mon article sur l’immatriculation des sahariennes, j’ai identifié sur base des photos d’époque différentes séries de Jeep 6 volts et 24 volts sur base de la plaque.

Depuis, ces séries se sont agrandies ou modifiées suite à la découverte de nouvelles photos d’époque sur Internet. Les voici en résumé (je ne reprends que les séries, càd minimum 3 Jeep identifiées sahariennes dont les numéros d’immatriculation sont assez proches) :

1959 : de 034 072 à 034 171
1961 : de 211 4004 à 211 4089
1962 : de 221 2130 à 221 2176 et peut-être jusque 2282
1963 : 231 1862 à 231 1918 et de 231 3409 à 231 3430

Cette méthode a comme limite que je ne suis pas certain du début et de la fin des séries, mais elle me permet d’identifier plus de 300 Jeep alors qu’on estime le nombre de sahariennes construites à +/- 400.

Cela dit, j’ai trouvé des photos de Jeep dont il n’est pas possible d’identifier la série. Exemple avec les sahariennes 6 volts 032 514 et 033 333. Autre exemple, je n’ai aucune photo de M201 Sahara produites en 1960.

Nous allons dès lors essayer de déceler les indices permettant de dire si un châssis est saharien ou pas.

Pour ce faire, nous utiliserons 2 méthodes : tout d’abord nous allons essayer de reconnaitre une saharienne sur base des numéros de série frappés sur le châssis.

Ensuite, nous tenterons d’identifier les stigmates des sahariennes ayant mal tournées à la Maltournée (ça c’est du jeu de mot…). En effet, à coup de disqueuses, de brasure, de soudure les sahariennes ont été standardisées en Jeep 24V. Ce sont ces cicatrices qu’il faut trouver.


1. Le numéro de série du châssis.

Un châssis de Jeep M201 possède de nombreuses informations. Sur le longeron avant droit, sur le côté extérieur juste derrière le pare-chocs, se trouve le numéro de série du châssis. C’est sur base de celui-ci que nous tenterons d’identifier une saharienne.

Et comment me direz-vous ? En étudiant ces numéros de série de châssis. Pour ce faire, je me suis constitué au fil du temps une base données des différents numéros se trouvant sur le châssis. Que constatons-nous ? Tout d’abord, jusque mi-1958, le numéro de série du châssis est un nombre de 4 chiffres, sans préfixe. Par exemple, ma Jeep immatriculée initialement 026-723 date de 1957 et son numéro de série du châssis est le 1220.

À partir de mi-1958, ce numéro est précédé d’un M. La Jeep 074-749 de 1958 a comme numéro de châssis le M408.

Les Jeep 24V commencent à sortir des usines en 1960 et on constate que les numéros se font précéder d’un MV à partir des Jeep 034-3xx. C’est probablement lié et c’est en tout cas ce que je lis sur le site hotchkissm201.fr de Jean-Louis Martin

Il est intéressant de noter que certaines Jeep ont leur numéro précédé par un VM au lieu d’un MV. Faute de frappes me direz-vous ? Je n’en suis pas certain car dans ce cas, le numéro est beaucoup plus petit comme vous pouvez le voir sur le tableau suivant :

En résumé donc, Les Jeep 6 volts ont comme numéro de série du châssis une série de chiffre jusque mi-1958, série qui se fait précéder par un M ensuite.

Les Jeep 24 volts ont comme numéros de série du châssis une série de chiffre se faisant précéder par un MV, et pour certaines rares Jeep et pour une raison inconnue il s’agit d’un VM.

Passons aux sahariennes maintenant. Pour ce faire voici un tableau reprenant les numéros de série du châssis de toutes les sahariennes que j’ai pu identifier :

Que constatons-nous ? Les châssis 6 volts sont précédés de SM (mis à part pour la Jeep 034-090 où il s’agit de MS). Les châssis 24 volts sont quant à eux précédés de MS.

Il existe aussi des châssis avec le préfixe MVS. Il est tentant d’associer ce S au Sahara, mais je pense que c’est faux. J’en ai pour preuve 2 exemples, représentés dans le tableau suivant et dont les châssis ne possèdent aucunes stigmates de sahariennes :

La première est la Jeep Fahrschule dont on peut suivre la rénovation sur le site SOS Jeep en détresse. J’ai trouvé la seconde sur le site d’Andy Carter, spécialiste anglais des M201 (www.m201.com).

Il est intéressant de noter que tout comme les Jeep avec un préfixe VM au lieu de MV, le numéro est petit : 3 ou 52 dans notre exemple. Pour info, voici les numéros d’une Jeep toute proche :

18344 – MV9487 – immat. :221 2785

On constate que le numéro 9487 est beaucoup plus grand.

Ces Jeep de 1962 sont en outre loin des séries d’immatriculation de sahariennes que j’ai identifiées.


2. Le numéro de châssis donné par l’armée

Ce nombre se trouve par défaut sur les Jeep sur le dessus du longeron avant droit, juste derrière le pare-chocs comme par exemple sur ma Jeep de 1957:

Or, sur une saharienne, ce numéro est masqué par le coffre à outil. Il a dès lors été frappé sur le côté extérieur du longeron avant droit, à côté du numéro de série du châssis, comme nous le constatons sur les 2 Jeep sahariennes suivantes :

Ex-Sahara 6 volts 034-090

Sahara 24 volts 231-1871

Donc, en plus du préfixe SM ou MS devant le numéro de série du châssis, le numéro de châssis donné par l’armée est poinçonné à un endroit légèrement différent.


3. Les cicatrices des sahariennes

Il faut ici tenter de trouver les traces des rajouts faits sur le châssis de type saharien. Pour ce faire, nous allons comparer un des derniers (si pas le dernier) châssis saharien intact avec un châssis saharien transformé.


3.1. Le coffre à outils

Les sahariennes possèdent un coffre à outil vissé sur les 2 longerons avant du châssis. Cela nécessite 2 trous par longeron comme vous pouvez le voir sur les photos suivantes :

Lors de la standardisation des Jeep, ces trous furent rebouchés et on peut donc voir à leur ancien emplacement des traces de ponçage et de soudures.


3.2. Le support du gonfleur Bavox :

Je détaillerai ce gonfleur dans un prochain article. Il se fixait sur la traverse avant du châssis, sur une plaque soudée à cet effet, comme vous pouvez le voir sur la photo suivante de la Jeep 231 1871 :

Sur la Jeep 034 090, on peut voir sur cette traverse les traces de l’ancienne soudure :

3.3 Le support du carénage de protection de la pompe à essence auxiliaire

Le long du longeron gauche du châssis, de part et d’autre de la pédale d’embrayage, se trouvait le filtre à essence et la pompe à essence électrique secondaire. Ce montage était fort vulnérable à cet endroit (projection de caillous,…). Il fut donc protégé par un carénage qui se fixait en différents points.

Tout d’abord à l’arrière de la pédale d’embrayage, on distingue 2 trous dans la plaque métallique de la traverse du châssis. Ces trous sont inexistants sur une Jeep normale. Ils sont encore présents sur la Jeep 034 090.

Ensuite, en avant de la pédale, les sahariennes possédaient 2 pattes d’attache soudées comme on peut le voir sur la photo suivante :

Ces pattes ont été ultérieurement meulées et on peut encore voir les traces des anciennes soudures sur la Jeep 034 090:

En conclusion, pour avoir un châssis saharien, il faut un préfixe SM ou MS devant le numéro de série du châssis. Je doute fortement du lien entre un châssis MVS et une Jeep saharienne. Une théorie circule disant que des châssis étaient destinés à des sahariennes (d’où la présence du S) mais ne furent jamais équipés comme tel. Je n’y crois pas du tout. Un châssis saharien possède des différences importantes qui devaient être effectuées directement à l’usine lors de sa construction. S’il n’y a aucune trace de ces différences, ce châssis n’a jamais été saharien.

En 1 mot, il faut plus d’un S pour avoir une saharienne. Ce sont toutes les traces des anciennes soudures de standardisation du châssis, ainsi que le poinçonnage sur le côté extérieur droit du longeron avant du numéro de châssis donné par l’armée qui vont déterminer l’origine exacte de votre Jeep.

A+

ps: merci à Thierry, le propriétaire de la Jeep 034 090 pour l’aide matérielle à la réalisation de cet article.

Big One

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