Depuis le début de la présence française dans le désert, les Escadrons Blancs y montent la garde et tentent d’éviter les pillages des oasis par des bandes organisées. Cette mission de surveillance s’effectua initialement sur des dromadaires, puis on remplaça les méharis par des Dodge récupérés à l’armée américaine après la seconde guerre mondiale.
L’adjudant Titus Polidori fait partie d’un de ces groupes de méharistes motorisés et le 11 février 1962 il est en patrouille dans le désert du Tanezrouft lorsqu’il repère dans une zone terriblement plane de reg une irrégularité sur l’horizon. Sa patrouille se rend sur place et tombe sur la carcasse d’un vieux biplan écrasé depuis des années. A côté de l’avion git le corps momifié du pilote. En fouillant la zone du crash, on découvre attaché à un hauban de l’avion le Logbook du pilote dans lequel ce dernier relate ses 8 derniers jours de survie dans l’endroit le plus inhospitalier au monde.
La patrouille de Polidori sur les lieux du crash. Au premier plan, on distingue le corps du pauvre aviateur.
Il s’agit de William « Bill » Lancaster, un aviateur anglais disparu en 1933 lors d’une tentative de record de vitesse en vol entre Londres et le Cap à bord d’un Avro Avian, Le « Southern Cross Minor ».
Bill Lancaster devant le Southern Cross Minor
Cet aventurier s’était lancé dans ce projet insensé en vue de se refaire un peu de pub et de relancer sa carrière après des déboires avec la justice. Ce genre de concours était courant à l’époque et les risques énormes. Saint-Exupéry n’a-t ’il pas failli mourir dans le désert Libyen en 1935 lorsque son Caudron Simoun s’écrasa sur un plateau, ce qui ensuite l’inspira pour son incroyable « Terre des Hommes » mais aussi pour le « Petit Prince » ? Dans les 2 cas une des causes principales de l’accident fut une préparation minime et précipitée. Pour Bill Lancaster ce sont des ennuis moteurs en pleine nuit qui le forcèrent à un atterrissage à l’aveugle en plein désert. Blessé, il resta près de son avion espérant des secours qui n’arrivèrent jamais.
La découverte d’un corps nécessite toujours de prévenir les forces de police ou la gendarmerie. Ainsi, Titus Polidori prend contact avec le poste de gendarmerie de Reggan pour signaler la découverte. Un convoi d’un Dodge 4×4 et de quelques Jeep de la gendarmerie est alors organisé pour aller récupérer la dépouille. On s’attend à ne récupérer que des os, mais le corps est étonnamment bien conservé, le Tanezrouft étant un des endroits les plus secs au monde. La dépouille est ramenée à Reggan et inhumée après autopsie.
L’Intendant Charles Mélin se voit confier la tâche de traduire le Logbook de Bill Lancaster. Avec son ami le Colonel Aubry, commandant de la gendarmerie à Reggan, ils décident de retourner sur les lieux du crash les 24 et 25 février avec un aumônier pour y effectuer une petite cérémonie. Ils s’y rendent en Jeep et bivouaquent sur place. De ce déplacement il reste 3 photos qui nous permettent d’observer les Jeep Sahara durant une opération dans le désert.
Le Colonel Aubry et l’Intendant Mélin dans la Jeep Sahara 24 volts 211 4056
Les 3 Jeep derrière l’épave pendant la lecture de la traduction du Logbook par Charles Mélin. Le 2 Jeep de gauche semblent être des 6 volts (forme ronde du filtre à air) et la 3ème est certainement dès lors la 211 4056.
Au premier plan, l’aumônier accompagnant l’expédition devant la Jeep 211 4056.
En 1975, une expédition fut organisée afin de récupérer l’épave. Elle fut finalement rapatriée en Angleterre puis en Australie en 1979 et fut exposée au Queensland Museum de Brisbane.
Cette triste histoire illustre les dangers du désert. Si vous voulez en savoir plus, je vous recommande de lire les articles du site du 3ème Groupe de transport, et notamment « Un papillon dans le désert » qui m’a permis de réaliser ce petit résumé. Il est touchant de noter l’émotion de tous les témoins de cette histoire 40 ans encore après les faits.
A+